THE ORGAN, quintet exclusivement féminin, prend racine à Vancouver en 2001 et a été bâti sur les cendres d'un ancien groupe (Full Sketch) par la chanteuse et compositrice Katie Sketch et l'organiste Jenny Smyth . Un single " Sinking Heart " et des performances lives très remarquées en première partie de groupes tels que Interpol, Hot Hot Heat, ou les Walkmen portent rapidement la formation sur le devant de la scène.
Dans la foulée, " GRAB THAT GUN " leur premier album paraît aux Etats-Unis chez Mint Records / 604 Records : guitares cristallines et obsédantes, chant rappelant étrangement le timbre de Morrissey, celui-ci condense les influences du groupe mais n'empêche cependant pas The Organ de développer un son personnel. Mélancolique et captivant, mélodique et instinctif, " Grab That Gun " flirte avec les Smiths, The Cure ou encore Kristin Hersh.
Et c'est sur scène que la musique de The Organ se dévoile un peu plus encore. Dans la foulée d'une petite série de dates en Angleterre début avril, les cinq canadiennes rejoignaient les Wedding Present et partageaient les murs de la Belly Up Tavern à Solana Beach (Ca), de Blueberry Hill à St Louis (Mo) et de bien d'autres lieux encore. Des prestations sombres, tendues et envoûtantes.
The Organ fait parti de la B.O. de TLW Saison 2 On les voit également...
Quelle scène, en plus !!!!!
INTERVIEW par le Cargo...Historique Pour les Français, The Organ est un groupe tout neuf, puisque le nom est apparu sur internet il y a une dizaine de mois, et a fait son petit bonhomme de chemin grâce au bouche à oreille. A l’initiative du label bordelais Talitres, l’album Grab That Gun est enfin disponible de ce côté ci de l’Atlantique et vous figuriez même à l’affiche de la Route du Rock le week-end dernier. Pour ceux qui ne vous connaitraient pas encore pourriez vous nous faire une rapide présentation ?
Jenny - Alors pour ma part j’étais à l’origine dans Full Sketch avec Katie (chanteuse) et quand le groupe a cessé d’exister nous avons eu envie de continuer l’aventure ensemble. A l’époque Katie était à la batterie mais avait envie de passer derrère le micro... On a juste réuni quelques amies et c’est ainsi que The Organ a commencé.
Le Cargo - Vous connaissiez les autres filles auparavant ?
Shelby - Non pas vraiment.
Jenny - En fait on a d’abord rencontré Deb (guitare) par l’intermédiaire d’un de nos amis à qui nous avions confié notre souhait de monter un groupe. Il nous a conseillé Deborah car elle savait jouer de la guitare. On l’a rencontrée et on s’est tout de suite mises à jouer ensemble. Au départ nous avions une autre bassiste mais elle a dû laisser sa place à Ashley car elle voulait se consacrer à son métier. On l’a un peu obligée à jouer de la basse après l’avoir croisée dans une soirée. (rires). Même chose avec Shelby (qui hoche la tête), on lui a juste fait comprendre que nous avions besoin de quelqu’un pour assurer la batterie et elle a accepté.
Shelby - C’est ce que je voulais faire depuis toujours. Ca me branchait de tenter quelque chose sans avoir essayé auparavant. Et puis je prenais des cours avec ce prof qui me disait que la batterie c’est pas pour les filles... alors moi je perséverais... Comme quand tu entends à la fin des concerts « wow t’es plutôt pas mal pour une nana »...
Le Cargo - Donc au départ Jenny, The Organ c’était d’abord Katie et toi... étiez vous déjà installées à Vancouver à l’époque ?
Jenny - Eh bien Katie, Deb et moi avons grandi là-bas, les deux autres sont dans le coin depuis déjà pas mal de temps. Mais nous venons toutes les cinq de l’état de Colombie Britannique.
Grab That Gun et ses retombéesLe Cargo - Depuis que Grab That Gun est sorti l’an dernier en Amérique du Nord que s’est il passé pour vous ? Les choses ont un peu bougé non ?
Jenny - On l’a d’abord sorti au Canada, du coup on a tourné un peu dans le pays, puis on a trouvé un distributeur en Australie. En Angleterre nos singles et notre EP étaient déjà disponibles. Ensuite on a pu commencer à tourner aux états-Unis. Mais nous sommes encore un jeune groupe qui continue d’être découvert par le public, du coup nous attirons à chaque concert de nouvelles têtes. On a toujours l’impression qu’on vient juste de commencer en quelque sorte en dépit du fait que nous jouons ensemble depuis pas mal de temps.
Le Cargo - J’ai entendu dire que l’enregistrement de Grab That Gun avait été compliqué pour vous, d’un point de vue financier, qu’il vous avait fallu aller de studios en studios parce que vous ne pouviez pas vous payer assez de journées d’enregistrement consécutives. Pouvez vous nous en parler ?
Shelby - En fait nous n’étions pas contentes de la première version de l’album, par conséquent nous avons dû le ré-enregistrer en intégralité par nos propres moyens... C’est une époque où nous étions vraiment obligées d’être sympas avec nos amis pour qu’ils nous prêtent de l’argent (rires)
Le Cargo - Vous êtes satisfaites du résultat maintenant ?
Shelby + Jenny - (en choeur) Ouais !!!
Le Cargo - Et financièrement vous êtes en mesure de mettre le prochain en route ?
Shelby - Quand on sera de retour à la maison on va commencer à écrire pour le nouvel album qui devrait sortir l’an prochain. On espère obtenir une petite aide de la part de notre maison de disques. Mais c’est de plus en plus compliqué pour nous avec les tournées... On n’a plus le temps de garder nos jobs respectifs. Pour ma part j’ai lâché le mien il y a deux semaines... Donc il n’y a pas d’argent qui rentre. Mais en même temps je n’avais plus d’autre choix.
Le Cargo - Vous êtes toutes dans cette situation avec un job à côté ?
Shelby - Oui. Chacune dans le groupe doit avoir un boulot à côté... mais nous les perdons toutes les unes après les autres ! C’est pas possible de tourner longtemps en espérant garder un boulot !
Jenny - Mais bon ça reste quand même génial puisque nous vivons notre rêve au maximum.
Processus créatif et identité sonore
Le Cargo - Vous pouvez nous expliquer le processus créatif au sein de The Organ ?
Shelby - Habituellement c’est Katie (chant) et Deborah (guitare) qui bossent sur quelque chose de leur côté puis chacune rentre dans la danse et apporte son petit truc. Ensuite on essaie de mettre ça en forme... et c’est soit oui soit non... tout ce qui fonctionne pour nous a le droit d’être joué ensuite pour le public.
Le Cargo - Vous avez déjà deq nouveaux titres qu’on pourra entendre ce soir ?
Shelby - Oui ! (clin d’oeil complice)on en fait quelques uns sur scène.
Le Cargo - Même si Katie n’est pas parmi nous maintenant mais j’aimerais quand même vous poser une question au sujet des paroles. Il semble que la mélancolie, voire la nostalgie, sont des sujets récurrents dans vos textes, comment ressentez- vous le fait d’être étiqueté comme un groupe un peu triste, n’avez-vous pas peur de voir cette réputation de « groupe triste à tendance revival années 80 » vous poursuivre au fil des années ?
Jenny - Pour ma part je pense... que c’est plutôt le cas ! ça ne me dérange pas outre mesure.
Le Cargo - Vous n’avez pas peur de faire trop cliché ?
Jenny - Je crois trouver pas mal d’éléments évoquant le bonheur dans nos chansons... Mais c’est certainement compliqué d’être objective étant moi-même très impliquée dans le projet. En tout cas ça me rend joyeuse de jouer, et je pense voir certains aspects qui, à mon avis, suggèrent tout autre chose que la mélancolie ou la noirceur de l’âme, mais qui prennent peut-être ces couleurs en touchant l’auditeur.
Le Cargo - Je crois qu’il existe ce même paradoxe dans le son même de l’orgue que tu utilises. Les lignes mélodiques sont légères et gaies mais le son de l’instrument est plein de gravité et de nostalgie, comme ces orgues des patinoires de hockey qui rappellent l’enfance.
Jenny - Oui c’est ça. Vraiment. J’ai d’ailleurs toujours aimé cet instrument pour sa diversité.
Shelby - T’es sûre que ce n’est pas parce que ça te rappelle le sous-sol chez ta grand-mère ?
Jenny - (rires) à vrai dire... oui, ça me rappelle sûrement ses disques kitsch de reprises, des standards de la pop mais joués à l’orgue ! Voilà les albums les plus hilarants que je connaisse !!! Mais l’orgue m’évoque aussi les églises et tant d’autres choses.
Le Cargo - J’ai pour ma part tendance à penser que ce son si caractéristique est en grande partie responsable de cette impression de nostalgie de votre musique. Alors quand on y ajoute les paroles de Katie...
Shelby - Oui je crois aussi que ce son est un peu le ciment de chacune de nos chansons, dans sa gravité et ses notes sombres, il enveloppe et souligne encore plus les lignes de guitares de Deborah.
Le Cargo - Vous avez déjà une idée de la manière dont vous voulez que le prochain album sonne ?
Jenny - Difficile à dire pour l’instant... en plus on est du genre lentes pour le boulot !!! (rires) On va bosser sur un morceau pendant une année entière en répèt avant de le jouer en concert, tu vois... Peut-être aussi parce que ces chansons ont pour nous une grande importance donc on préfère les bichonner avant de les présenter au public.
Shelby - C’est vrai qu’on n’est pas pressées pour le songwriting !!!
Jenny - Je crois que c’est juste comme ça que les choses fonctionnent pour nous, entre nos différentes personnalités et qu’on ne peut pas forcer les choses...
Shelby - quand c’est le bon moment...
Jenny - ... c’est le bon moment !
Le Cargo - Enfin les choses iront peut-être plus rapidement maintenant que vous êtes débarrassées de vos obligations professionnelles, non ?
Shelby - Ah mais oui... j’avais presque oublié... je n’ai PLUS à bosser ! Enfin... je ne devrais pas dire ça... je sais qu’à peine rentrée à la maison je vais me remettre à chercher un emploi, mais bon... pendant quelques semaines on va dire que j’ai tout le temps libre que je souhaite pour me concentrer sur la musique, et c’est tout ce que j’ai toujours voulu faire. Mais ça devenait impossible de concilier cette envie avec un job à plein temps. C’est vraiment crevant... donc oui peut-être bien que les choses iront plus vite dorénavant...
Le Cargo - Quel est votre rythme de travail quand vous êtes à la maison ?
Jenny - C’est variable... Par exemple Deborah descend au local presque tous les jours... mais elle vit tout près.
Shelby - Eh bien je pense que désormais je vais y être bien plus souvent !
Jenny - (à Shelby) Ce qui est différent pour toi c’est que tu es obligée d’aller au local pour jouer alors que moi j’ai des instruments chez moi. Je veux dire que je joue de la musique tout le temps... mais en groupe ça dépend si nous travaillons sur quelque chose de précis. A ce moment là je vais au local bien plus souvent, presque tous les jours même.
En tournéeLe Cargo - Une question au sujet de la vie en tournée, comment ça se passe entre vous pendant tout ce temps ensemble, pas trop dûr de se supporter les unes les autres ?
Shelby - Ne m’en parle pas ! (rires)
Jenny - Eh bien nous sommes de bonnes copines mais bon tu sais ... c’est comme dans un couple marié... tout ce temps passé ensemble au bout d’un moment...
Shelby - Le plus drôle c’est qu’une fois rentrées après deux mois sur la route 24h/24 ensemble, il ne se passe que deux jours avant que je prenne le téléphone “Hey Jenny ? Tu fais quoi là ?”
Jenny - “ça te dirait de passer à la maison ?” (rires)
Shelby - On partage les bons moments comme les plus durs. C’est autant facile que ça peut être compliqué.
Jenny - On se chamaille... mais ça fait partie de l’apprentissage de la vie en groupe.
Shelby - Mais ça marche plutôt bien. On sait quand il faut s’arrêter, on connaît les limites de chacune je pense.
Jenny - Oui oui, on a appris tout ça. La première fois que nous sommes parties en tournée c’était du genre “woooow on part en tournée”, tout était tout rose. Et puis on a dû apprendre à faire avec les états d’âmes de chacune d’entre nous. Apprendre à vivre à 5 ou 6 dans un espace réduit, à conduire un van sans nous paumer... ! Mais ça va tout ça... c’est de plus en plus facile.
Le Cargo - Combien de personnes vous accompagnent sur cette tournée ?
Jenny - C’est variable. Parfois c’est juste nous cinq dans un van.
Shelby - (rires)
Jenny - Parfois Linda, notre manager, nous accompagne.
Shelby - Sur cette tournée précisément nous sommes huit. C’est la première fois que nous sommes aussi nombreux ! Mais c’est aussi la première fois que nous avons notre propre ingé son... Si seulement on pouvait le ramener au Canada !
Jenny - Oui, parce qu’il est anglais en fait. On avait tout simplement besoin d’un chauffeur pour les dates outre-Manche parce que conduire à gauche... hum hum... (rires)
Shelby - Par contre ici ça va, on se débrouille !
Jenny - ... juste qu’on sait pas trop se repérer sur le Périph’ et dans les rues. Tu sais, c’était déjà un sacré défi la première fois qu’on a conduit en dehors de notre ville ! Mais on s’en est sortie... Donc, pour en revenir à notre chauffeur, nous en avons choisi un qui puisse en plus assurer notre son sur scène. Ensuite on la obligé à nous suivre jusqu’en France !
Shelby - On lui a laissé croire qu’il pourrait prendre des vacances avec nous... mais en fait il se retrouve à bosser encore plus (rires)
Le Cargo - Vous restez longtemps à Paris ?
Shelby - On repart demain.
Jenny - Mais on reviendra en novembre pour quelques dates en France.
Le Cargo - Vous venez de jouer à La Route du Rock, comment s’est passé ce premier concert français ?
Shelby - C’était aussi notre premier concert en festival... C’était incroyable ! Il y avait tellement de monde... c’était vraiment excitant ! Complètement différent de ce qu’on peut vivre dans une petite salle sombre, en plus on a joué vers 19h30 et le soleil n’était pas encore couché. C’était aussi une autre ambiance que nos concerts en première partie du Wedding Present au printemps dernier. Eux ils avaient leurs fans, certains les suivent depuis plus de 20 ans, et ces gens ne venaient que pour les voir.
Jenny - D’ailleurs j’étais surprise de voir qu’à la fin de nos sets, pas mal d’entre eux venaient nous parler, nous dire qu’ils avaient vraiment apprécié notre musique... Oui, je crois qu’on s’est fait de nouveaux fans pendant cette tournée-là (rires).
Shelby - Mais pour moi, jouer ce festival c’est un peu l’évènement le plus important de la jeune carrière du groupe. Du fait du nombre de spectateurs, de jouer en France, et en plus d’ouvrir pour les Cure !!! Ce groupe fait vraiment partie de nos influences... Je veux dire que j’ai grandi avec leurs albums. Après notre concert... oh que c’est naze (rires)... j’ai téléphoné à ma mère pour lui dire « hey maman je viens juste de faire la première partie des Cure !!! » et elle était hystérique, parce qu’elle sait bien ce que cela représente pour moi. Elle m’a répondu un truc du genre « quoi ??? tu veux dire le groupe de ce mec dont tu avais les posters aux murs de ta chambre !!!???? »
(à suivre)